Présentation

Parcourir ensemble cette véritable encyclopédie du rire que constitue Le Fil à la patte, voilà ce à quoi je voudrais vous convier.

Du Rire et de la Musique

Du simple jeu de mots au Théâtre de l’absurde, l’alchimiste Feydeau expérimente systématiquement, scientifiquement et magistralement tous les ressorts imaginables (et inimaginables) du rire.
Il nous entraîne dans une danse folle passant de la plus franche rigolade potache au fou rire inextinguible, du rire bête au rire niais, de l’incrédulité devant la chute inéluctable et annoncée à la moquerie méchante et sarcastique, de la blague la plus simple aux pièges les plus alambiqués, de l’humour noir au rire jaune.

En arrangeant les folies qui déchaînent l’hilarité du public, je n’en suis pas égayé, je garde le sérieux, le sang froid du chimiste qui dose un médicament. J’introduis dans ma pilule un gramme d’imbroglio, un gramme de libertinage, un gramme d’observation. Je malaxe, du mieux qu’il m’est possible, ces éléments. Et je prévois presqu’à coup sûr l’effet qu’ils produiront.

Georges Feydeau

Et c’est bien de folie qu’il est question ici.
Folies auxquelles nous entraînent le désir irrépressible ou le mensonge le plus bénin.
… Folies, folie…
… Et Bouzin, qui en appelle à l’Histoire, emmené par la police, nu comme un ver, sous les huées de la noce, pris qui croyait prendre…
… Et Lucette qui se venge de la trahison de Bois d’Enghien, son futur ex-amant, en faisant l’amour avec lui dans la chambre de la maman de sa fiancée (au vu et au su de tous bien sûr)…
… Et toutes ces portes qui se ferment et s’ouvrent au gré des pièges posés par Feydeau à ses personnages, au gré des expériences de notre chimiste fou…

… Et pendant ce temps Bois d’Enghien, tout au long de sa chute, s’en va répétant « ça va bien »…

Et donc la musique…

Quelques indices clairs et un désir tenace m’ont fait penser que la musique pouvait avoir une place importante dans ce projet.

Lucette est une chanteuse de cabaret engagée pour la soirée de fiançailles de son petit ami, accompagnée par son régisseur (et ex-mari) et par son habilleuse (et actuelle sœur). C’est notre premier indice.
Bouzin est un auteur de chansons populaires, il a écrit une chanson pour Lucette qu’il chante dans son salon. C’est notre second indice.
Le troisième acte propose qu’une grande partie des dialogues entre Viviane, l’ex-ex-future-femme de Bois d’Enghien, et Bois d’Enghien, son ex-ex-futur-mari, soient chantés. Viviane demande à celui-ci de se faire passer pour M. Capoul, son professeur de chant. C’est notre troisième indice.

Nous sommes alors allés plus loin. La pièce est parsemée de parties « parlées » en chœur. « Tous » est l’indication de Feydeau. La noce qui passe et repasse « parle » aussi d’une seule voix.
Nous avons pensé que (comme souvent dans les vaudevilles) la musique pouvait avoir une place tout à fait légitime et privilégiée. Elle serait introduite par « bouffées » jusqu’à être omniprésente.
J’ai pensé à ces films des Marx Brothers où de façon inattendue et folle, la musique et le chant s’invitent.

J’ai demandé à Reinhardt Wagner (compositeur français de René l’énervé de Jean-Michel Ribes) si l’aventure le tentait et si cela lui paraissait possible d’écrire une musique qui soit inspirée de l’opérette bien sûr, mais aussi de la comédie musicale. Sa réponse enthousiaste nous permet de continuer de rêver.

Par ailleurs, de L’Opéra de quat’sous à Brecht Cabaret en passant par La Décision, Famille d’artistes et Jean la Chance, la musique est une voie d’exploration importante de mon travail. Plus précisément le théâtre avec musique et chants.

Notre projet est un projet un peu fou (Feydeau nous y invite). Il y aura 14 comédiens, 4 musiciens, un petit chœur amateur (que nous formerons dans chaque ville, si possible). Malgré cela, nous voulons que ce spectacle soit raisonnable et accessible en termes financiers. Les efforts de chacun nous le permettent. Nous voulons à toutes forces rester dans le cadre d’un théâtre public, populaire et artistiquement ambitieux

Jean-Claude Fall